English version« Le dépistage du cancer du sein est-il inutile, voire néfaste ? » : analyse de l'argumentaire INCa

Après un billet pour dénoncer le comportement inadmissible de l'INCa, qui traite d'infox toute interrogation sur l'intérêt du dépistage du cancer du sein, voici une analyse de l'argumentaire utilisé par l'INCa. ( Accéder au site de l'INCa)

Pour commencer un point consensuel : il est indéniable qu'une tumeur maligne peu évoluée est de traitement plus facile et de meilleur pronostic qu'une tumeur maligne très avancée.
Personne ne conteste cette réalité. Ce qui est contesté par certains, c'est la capacité du dépistage à détecter précocement les tumeurs évoluées.

L'INCa reconnaît la réalité des surdiagnostics mais présente comme factuelle une fréquence de 10 à 20% des tumeurs malignes détectées lors du dépistage.
En réalité, ce chiffre de 10 à 20% n'est ni "vrai", ni "faux". Dans la littérature scientifique, selon les études, la fréquence du surdiagnostic varie de quelques % à près de 50%. Le chiffre de 10 à 20% n'a pas de base scientifique mais n'est qu'une opinion, une estimation "moyenne", des experts de l'INCa. Dans l'incertitude scientifique de la fréquence réelle des surdiagnostics, cette estimation en vaut une autre mais il est malhonnête de la présenter comme une réalité bien établie.

L'argumentaire de l'INCa insiste fortement sur l'intérêt du diagnostic précoce et une réduction de mortalité par cancer du sein, proclamée entre 15 à 21%.
En revanche, l'absence de diminution de la mortalité globale est passée sous silence. C'est pourtant le principal point d'intérêt pour une femme qui se demande si elle doit ou non participer au dépistage.

Les risques du dépistage sont, eux, présentés de manière caricaturale. L'argumentaire insiste largement, pour le minimiser, sur le risque de cancers radio-induits.
Les surdiagnostics et surtraitements, qui constituent pourtant le principal risque du dépistage, sont à peine évoqués. Qui plus est, s'ils sont mentionnés, c'est surtout pour donner l'occasion de rappeler que ce sont de "vrais" cancers.

Avec un tel déséquilibre dans la présentation des bénéfices et des risques, il n'est pas surprenant que l'INCa conclut péremptoirement : « Le dépistage des cancers du sein apporte aux femmes un bénéfice bien plus important que ses risques. »
Cette affirmation est présentée par l'INCa comme une évidence incontestable. C'est faire bien peu de cas des souffrances physiques, psychologiques et sociales que vont provoquer les surdiagnostics et surtraitements engendrés par le dépistage.

La réalité du rapport bénéfices/risques du dépistage c'est :

De toute évidence, l'INCa a choisi de considérer que surdiagnostics et surtraitements sont le prix à payer pour éviter des décès par cancer du sein. C'est un choix qui a sa logique.
Mais ce n'est pas le seul choix possible. Considérer que surdiagnostics et surtraitements constituent un prix excessif pour éviter quelques décès par cancer du sein, sans amélioration significative de l'espérance de vie, est un choix qui a lui aussi sa logique et qui est tout à fait respectable.

Ce qui est certain, et peu importe si l'INCa le considère comme une infox, c'est que les 2 options peuvent se défendre et que c'est à chaque femme, et à elle seule, de choisir, après avoir été informée honêtement et complètement.



Dernière mise à jour le 12/09/2021

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